Par Quentin | Domaine d'expertise : Spécialiste fiscalité
Publié le 17 septembre 2024 | Temps de lecture : 7 minutes
Comprendre les bases : EURL et SASU
EURL ou SASU ? Faire le bon choix constitue souvent un défi pour les entrepreneurs, les deux statuts juridiques présentant à la fois de nombreux points communs et des différences subtiles. La bonne décision dépend de la nature de votre projet, de votre situation personnelle, mais aussi de vos aspirations professionnelles.
Ce guide Hello bank! Pro vous présente l'ensemble des éléments incontournables à connaître pour sélectionner l'une ou l'autre de ces deux formes juridiques d'entreprises unipersonnelles. Découvrez notre comparatif SASU vs EURL !
La SASU et l'EURL sont deux formes d'entreprises unipersonnelles et de sociétés commerciales , dotées d'une personnalité morale, à la différence de l'entreprise individuelle (EI). Elles offrent la possibilité à une personne seule de lancer un projet avec une responsabilité limitée.
- La SASU, ou société par actions simplifiée unipersonnelle , se présente comme une version individuelle de la SAS. Elle offre une grande souplesse dans son fonctionnement, mais aussi concernant la rédaction des statuts, d'où une flexibilité importante pour organiser la gouvernance de l'entreprise.
- L'EURL, ou entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée , correspond, quant à elle, à la déclinaison individuelle de la SARL (Société à Responsabilité Limitée). Dans ce cadre plus réglementé, l'associé unique bénéficie d'une grande stabilité et de statuts moins souples.
Les points communs entre les deux statuts sont nombreux. La SASU comme l'EURL présente des avantages et inconvénients lui étant propres. Le tableau ci-dessous vous offre un récapitulatif clair :
Principaux avantages | |
---|---|
SASU | EURL |
Souplesse pour évoluer vers une SAS plus tard | Facilité pour évoluer vers une SARL ultérieurement |
Liberté accordée à l'associé unique pour rédiger les statuts | Possibilité de confier la gérance à un tiers |
Président assimilé-salarié, affilié au régime général de la Sécurité sociale | Option pour l'IS (Impôt sur les Sociétés) |
Protection sociale plus avantageuse, édition d'un bulletin de salaire, mais pas d'assurance chômage | Niveau de charges et cotisations sociales plus faibles, mais pas d'assurance chômage |
Principaux inconvénients | |
---|---|
SASU | EURL |
Des risques financiers plus importants liés au fait que l'associé unique est responsable des dettes sociales de la société à hauteur de ses apports en capital. | Cadre de fonctionnement très encadré par le Code de commerce |
Niveau de charges et cotisations sociales élevées | Affiliation du gérant à la Sécurité sociale des indépendants, peu protectrice. |
Option pour l'IR limitée à cinq ans
Clôture comptable obligatoire : coûteux et complexe |
Clôture comptable obligatoire : coûteux et complexe |
Les ressortissants des pays de l'Union européenne, de l'Espace économique européen ou de Suisse bénéficient d'une liberté de principe pour créer une SASU ou une EURL en France. Les entrepreneurs originaires d'autres pays, en revanche, doivent obtenir au préalable une autorisation provisoire de séjour (APS). Cette autorisation donne un délai d'un an pour développer le projet entrepreneurial (1) .
Au terme de cette période, si l'entreprise est viable, une demande de carte de séjour temporaire, mention entrepreneur-profession libérale, est requise pour continuer l'activité non salariée en France.
Responsabilité et patrimoine personnel
Le gérant de l'EURL, mais aussi le président de la SASU bénéficient tous deux d'une protection de leur patrimoine personnel, dans des conditions comparables. Opter pour l'une ou l'autre n'exerce ainsi aucune influence. L'EURL et la SASU se distinguent d'une entreprise individuelle (EI) classique ou d'une (EI) micro-entreprise, mais en matière de protection du patrimoine personnel, l'entrepreneur individuel bénéficie désormais également d'une protection de son patrimoine personnel.
La responsabilité du gérant ou du président se limite au montant de ses apports au sein de la société. Dans le cas où l'entreprise rencontrerait des difficultés financières, le patrimoine personnel du gérant ou du président ne peut ainsi être saisi pour régler les dettes de l'entreprise.
Dans ces deux régimes juridiques, la personne en charge de la gestion de la société peut toutefois voir sa responsabilité civile et pénale engagée devant le juge en cas de faute de gestion d'une certaine gravité. Les manquements les plus courants incluent :
- Le détournement des fonds de l'entreprise (factures fictives, attribution de dividendes injustifiés).
- Une caution solidaire prise pour l'entreprise pour la garantie d'un emprunt personnel.
- L'omission de déclarer l'état de cessation de paiement, ou une négligence dans la mise en place de mesures de sauvegarde.
- Un manque d'implication manifeste dans la gestion de l'entreprise.
- Des comportements contraires aux intérêts de la société.
Ces actions exposent la responsabilité personnelle du dirigeant en raison de son imprudence ou de sa négligence. Les sanctions résultantes correspondent généralement aux dommages occasionnés par ces actions.
Capital social et apports
Le capital social d'une SASU ou EURL n'est pas soumis à un montant minimum strict, offrant ainsi une grande flexibilité. Il peut se réduire à une somme symbolique, même à 1 €. Conformément à la structure de chaque entité, le capital est ensuite divisé :
- En parts sociales concernant l'EURL.
- En actions concernant la SASU.
Dans ces deux structures, deux types d'apports peuvent par ailleurs être effectués :
- Les apports en numéraire représentent toute somme d'argent injectée dans la société.
- Les apports en nature englobent tout bien autre que de l'argent, pouvant être évalué financièrement et transféré. La diversité de ces apports est vaste. Elle inclut par exemple des fonds de commerce, des créances, des marques, des brevets, du matériel informatique ou des véhicules.
Pour les apports en numéraire, il est requis de libérer au moins 20 % dès la création de l'EURL ou 50 % pour la SASU (2) .
S'agissant des apports en nature, leur libération complète est exigée à la constitution de la société dans les deux cas. Si la valeur de cet apport dépasse 30 000 € et représente plus de la moitié du capital social, une évaluation par un commissaire aux apports est obligatoire (2) .
Le dépôt du capital social s'effectue impérativement sur un compte bancaire professionnel. Une attestation de dépôt de fonds sera délivrée par la banque, document nécessaire lors de l'immatriculation de votre EURL ou SASU.
Bon à savoir : SASU ou EURL : l'apport en industrie est-il possible ?
La SASU tout comme l'EURL peuvent bénéficier d'un apport en industrie, c'est-à-dire une mise à disposition d'un savoir-faire technique par l'associé. Néanmoins, ce type d'apport ne peut pas être intégré dans le calcul du capital social de l'entreprise.
Gestion et administration
Dans une EURL, la direction de la société est confiée soit à la personne à l'origine de la création de la structure (le fondateur), soit à un tiers. Ce gestionnaire est désigné sous le terme de « gérant » . Il ne peut être qu'une personne physique. Il est nommé par l'associé unique de l'EURL. Ce dernier a ainsi la possibilité de se désigner lui-même comme dirigeant.
Concernant la SASU, la gestion opérationnelle de la société est sous la responsabilité d'un « président » . Ce dernier est aussi nommé par l'associé unique. Contrairement à l'EURL, le dirigeant d'une SASU peut être soit une personne physique soit une personne morale.
Le tableau ci-dessous vous propose un récapitulatif des modalités de direction et gestion de chaque type de société :
EURL | SASU | |
---|---|---|
Nom du dirigeant | Gérant | Président et d’autres dirigeants possibles (directeur général) |
Nature du dirigeant | Personne physique | Personne physique ou morale |
Dirigeant et associé unique peuvent être des personnes différentes | Oui | |
Nomination | Par l’associé unique | |
Pouvoirs | Gestion opérationnelle de la société, dans le respect des limites imposées par son objet social | |
Rémunération | Aucun minimum imposé | |
Statut du conjoint* | Conjoint associé, salarié ou collaborateur | Conjoint associé ou salarié |
*Dans le cas où un conjoint prend également part à l'entreprise
Fiscalité et charges sociales
La fiscalité appliquée à l'EURL, mais aussi à la SASU constitue un point de distinction majeur entre ces deux formes juridiques. L'une est liée au régime des sociétés de personnes, l'autre non.
Concernant le régime fiscal de l'EURL , les bénéfices réalisés sont imposables par défaut via l'impôt sur le revenu (IR). Néanmoins, le gérant de l'EURL a la possibilité d'opter pour une imposition à l'impôt sur les sociétés (IS). Sous ce régime, l'entreprise devient redevable de l'impôt, et le gérant sera imposé à titre personnel uniquement sur sa propre rémunération. Auparavant, ce choix d'imposition à l'IS était irréversible. Depuis 2019, le gérant de l'EURL peut reconsidérer cette décision jusqu'à cinq ans après la création de la société (3) .
En ce qui concerne la fiscalité de la SASU , celle-ci relève par défaut du régime de l'impôt sur les sociétés (IS). Néanmoins, le président de la SASU peut aussi opter pour un assujettissement à l'impôt sur le revenu en remplissant certaines conditions bien précises (4) :
- Une ancienneté maximale de cinq ans pour sa SASU.
- L'exercice d'une activité commerciale, artisanale ou libérale.
- Un chiffre d'affaires inférieur à 10 millions d'euros.
- Moins de 50 salariés.
- L'absence de cotation en bourse.
Les deux formes de sociétés permettent le versement de dividendes . La différence majeure, en la matière, concerne les cotisations sociales applicables. Dans une SASU, les dividendes perçus par l'associé ne sont pas assujettis à des cotisations sociales. En revanche, pour l'EURL, les dividendes sont soumis à des cotisations sociales pour la fraction dépassant 10 % de la somme du capital social, des primes d'émission et des sommes versées au compte courant (5) .
Des différences plus générales s'appliquent enfin concernant le montant des cotisations sociales (6) :
- En EURL, elles représentent en moyenne 45 % de la rémunération nette , ou environ 30 % en cas de rémunération excédant le plafond annuel de la sécurité sociale. En l'absence de rémunération, des cotisations sociales minimales restent dues.
- En SASU, les cotisations sociales salariales et patronales représentent environ 64 % du salaire brut (ou 82 % du salaire net). En cas d'absence de versement de rémunération, aucune cotisation sociale n'est exigée.
Formalités de création et coûts
La création d’une SASU et celle d’une EURL impliquent des formalités globalement assez similaires. Le coût de la démarche est par ailleurs comparable.
La première étape est la rédaction des statuts , obligatoire pour toute société commerciale. Concernant une EURL dont la gérance est assurée personnellement par l’associé unique, un modèle de statut type peut convenir assez facilement. Le formalisme, en effet, est très encadré, mais ne laisse que peu de marge de manœuvre. Ce modèle peut vous être fourni par le greffe.
En revanche, la loi accorde à l’associé en SASU une liberté statutaire plus étendue. Il est recommandé de faire appel à un avocat spécialisé , voire à un notaire si vous souhaitez personnaliser largement vos statuts.
La demande d’immatriculation , pour les deux types de sociétés, se réalise exclusivement en ligne depuis le 1er janvier 2023, via le guichet unique de l’INPI (6) . Dans les deux cas également, certains frais sont à prévoir. Ils incluent (5) :
- Les frais de greffe pour l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) varient entre 37 et 70 €. Pour l’immatriculation au répertoire des métiers (RM), le coût moyen s’élève à 45 €.
- S’y ajoutent les frais de publication dans un journal d’annonces légales, représentant, en moyenne, 130 €.
- Des frais liés à des conseils de professionnels, tels que des avocats ou des experts-comptables, peuvent enfin être engagés si vous sollicitez leur assistance.
Évolution de la structure juridique
La SASU, tout comme l’EURL, n’excluent pas une évolution future vers un autre statut. La première, cependant, est un peu plus flexible que la seconde.
La transformation d’une SASU en SAS est relativement simple. Aucun changement statutaire n’est requis. Elle se résume à une ouverture du capital social à d’autres actionnaires. Une simple modification de l’extrait Kbis sera nécessaire. Cette transformation peut être par ailleurs prévue dans une clause statutaire dès la création de la société.
Le passage d’une EURL à une SARL implique des formalités plus lourdes – mais nullement insurmontables. Une modification statutaire est, en effet, obligatoire. De plus, une nouvelle publication dans un journal d’annonces légales sera exigée par le greffe pour la prise en compte de cette modification.
Il est enfin possible de transformer une SASU en EURL , ou inversement. Vous pouvez, par exemple, souhaiter un changement de régime fiscal ou bénéficier d’une sécurité juridique accrue dans l’exercice de votre activité. Cette décision relève de l’associé unique de la SASU ou de l’EURL : elle doit être formalisée dans un procès-verbal. Elle nécessite la modification des statuts, mais il ne sera pas indispensable de passer par un commissaire à la transformation.
Les 3 points clés à retenir :
- EURL et SASU sont deux formes d’entreprises unipersonnelles partageant de nombreux points communs.
- Elles présentent toutefois des différences fondamentales, par exemple en matière de fiscalité ou de couverture sociale.
- SASU ou EURL ? Tout dépend de votre projet entrepreneurial et de vos objectifs.
Les informations communiquées dans cet article sont à titre indicatif et non exhaustives. Il appartient au lecteur de se rapprocher de toute structure d'accompagnement ou tout conseil juridique, fiscal ou comptable pour disposer des informations complètes et précises.